La Ballerine
Dans un décor de fin du monde, Raphaëlle Schotsmans nous convie à une métamorphose : une ballerine évolue, tantôt semblant ployer sous le poids d’une main imaginaire, tantôt s’élevant vers les airs. L’artiste nous oblige à l’exigence, rien ne se dévoile au premier regard, il faut embrasser la série dans son intégralité, pour en percevoir toute l’étendue symbolique. Et c’est là, dans ce moment suspendu, que nous réalisons ce qui se joue sous nos yeux, et que le regard perçoit ce qui est tu.
La ballerine convoque des souvenirs enfouis, des rêves d’enfant, à la fois mythe du Lac des cygnes et figurine entêtante de boîte à musique, personnage qui semble s’échapper d’une condition qui la maintient dans l’immobilité d’un rôle, contre son gré. La légèreté de la danseuse est empêchée par les gravats qui jonchent le sol, elle se défait de tout ce qui entache sa pureté, luttant contre des forces invisibles. Sont-elles à l’extérieur ou bien en elle? Les débris au sol précèdent-ils son passage ou est-ce qu’ils lui succèdent?
Cette dualité entre destruction et sérénité se révèle dans le corps même du modèle, qui lutte pour quitter l’effroi que son environnement inspire, uniquement vêtue d’un costume de ballet. Voilà ce qui se joue ici, la fragilité est un leurre, elle peut cacher sous un aspect délicat, une puissance insoupçonnée. C’est une mue vers la lumière. Au milieu du chaos, on assiste alors à une renaissance, et à l’envol d’une femme bien plus forte qu’on ne le croit.